Tourisme en Arabie Saoudite


Ce sont des extraits du magazine Jeddah Infos Loisir nr 1


 

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Cher lecteurs,

J .I.L. (Jeddah, lnfos, Loisirs) le seul magazine en français à Jeddah, est le fruit d'une proposition présentée en janvier 2005 à la Division automobile de la société Omar A. Balubaid, agent importateur et distributeur de Peugeot et d'autres marques d'automobiles dans le Royaume. Cette démarche réaffirme ma volonté de mettre à la disposition de la communauté des expatriés, dont je fais partie, un outil supplémentaire de communication. Grâce â cette alliance avec un sponsor statutairement et financièrement fiable, et partageant un intérêt commun, bien que nos objectifs diffèrent, l`émission d'un magasine au profit de la communauté francophone est aujourd'hui à nouveau une réalité.

Par son implication dans ce projet, la Société Omar A. Balubaid marque sa gratitude vis-à-vis de la Société Peugeot. En offrant ce magazine aux concitoyens de l'industriel sochalien, et a ceux qui ont en commun l`usage de la langue française, la société Omar A. Balubaid salue la marque au lion pour sa précieuse contribution dans le domaine des transports en Arabie Saoudite (depuis un demi-siècle dejà) et la félicite pour les fructueuses relations établies depuis plus de sept ans entre les deux sociétés. Nul doute que ce gage d'amitié renforcera les liens de convivialité entre les différentes communautés.

Pour son généreux soutien, le premier jamais offert à une publication occidentale dans ce pays, nous consacrerons quelques pages au domaine de l'automobile, comme vous le découvrirez dans ce numéro. Cependant, les lecteurs peu intéressés par les choses de l'automobile ne seront pas délaissés, d”où les rubriques, nouvelles, arts. randonnées et autres loisirs, sans compter les informations pratiques à destination du plus grand nombre.

ll ne me reste qu`à vous souhaiter une bonne lecture de JIL. Pour ma part je nourris l'espoir que la lecture de ce magazine fasse se développer quelques vocations de rédacteurs, et que votre envie de coopération avec l'équipe de JIL vous pousse à grossir le mini comité de rédaction actuel. Vos articles, contes, conseils blagues, reportages, caricatures, commentaires et critiques divers sont à ce titre tout à fait les bienvenus.

Notre adresse e-mail est la suivante : chamamb2@yahoo.com
 

Mike Chama

 

S O M M A I R E

 

Rallye 1 Paris - Dakar 2005 ...............................2
Championnat du Monde des Rallyes 2005 .................5
News d'ici ...........................................8
Histoire : Peugeot deux siècles d'histoire industrielle ........11
Reportage : De Jeddah à Méda'in-Saleh .................13
L`autre histoire de Méda'in-Saleh ......15
Dossier Spécial : Sacres Dédanites! ..................16
Interview : Avec Patrick Piérard ...................22
Exposition : Salon international de Genève ........24
Balubaid et Peugeot .................................25
Nouvelles Alliances .............................27
Agenda ...........................29
Peugeot 907 : Concept car......30
Art : Eminemment féminin ..................32

 

J .I.L. (Jeddah, Infos, Loisirs) est édité par la division automobile de la société Omar A. Balubaid,
agent importateur et distributeur de Peugeot. REDACTEURS : Mike Chama, Patrick Piérard.
CONCEPT, GRAPHIQUE, PHOTOS : M. Chama, S. Bernard, P. Piérard

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NEWS D'ICI

(revue de presse)

Qu'est-ce que les terroristes ont fait de Médain Saleh - AlHayat 5.2.05

Question posée par Mosleh Jamil, journaliste du quotidien Al-Hayat, dans son numéro du 5 février. Monsieur Jamil s'est rendu à Al Ula avec deux amis photographes durant les vacances de la dernière fête musulmane. Ils ont été très déçus de la désertion presque totale des touristes, alors que les hôtels étaient fréquentés en masse par les étrangers il y a deux ans. L'hôtel Arak et celui de Madain Saleh ont été ouverts il y a quelques années pour promouvoir le développement du tourisme dans la région et créer des emplois pour la jeunesse locale. Les choses maintenant ont pris une tournure bien différente : après le 9/11, plusieurs agences de voyage ont fermé et les fournisseurs de produits et de services hôteliers se sont désintéressés du site.

Al-Suleiman, guide et reporter très connu dans le domaine du tourisme, raconte qu'il a commencé il y a huit ans comme journaliste. Étant originaire de ce pays, il a ensuite accompagné dans leurs visites les délégués étrangers, puis les touristes. Alors que des étrangers des quatre coins du monde venaient admirer les merveilles de l'endroit, le 9/11 a marqué un coup de frein brusque à l'activité touristique qui aujourd'hui encore en subi les conséquences.

 

Les chauffeurs de Taxi saoudiens - Al Watan 13.2.05

Réalisent pour la 1ère fois un revenu de plus de SR 300 par jour, quatre fois plus que d'habitude. Un manque de taxis très évident s'est fait sentir le 11.2.05 à Djedda à la suite de l'arrêt de plusieurs conducteurs étrangers à cause des nouvelles lois sur la saoudisation. En revanche les revenus des conducteurs saoudiens sont montés en flèche par suite du manque de concurrence. Cependant cette joie n'était que provisoire à la suite de la suspension de la décision ministérielle le lendemain.

 

Appel international à 1 SR la min. - Saudi Gazette 15.2.05

Du cyber café à Riyadh, l'appeI téléphonique international ne coûte plus qu'un Riyal la minute, attirant des clients masculins en masse, pour la plupart du sud-est asiatique. Quant aux femmes - pour les cafés dépourvus de sections familiales - des combinés sans fil sont mis a leur disposition a l'extérieur afin de leur permettre de téléphoner sans descendre de leur voiture. Les cartes d'appel prépayées (utilisables uniquement par l'lntemet), telles Easy 4 dial, RPFone, Hot Foon, PCPhone, PhoneServe et KSA, sont déjà en vente libre sur le marché au prix de 30 SR. ll existe deux genres de cabines, une pour les services STC, l'autre pour les appels directs à un riyal pour l`Inde et 1,5 SR pour les autres destinations internationales.

A ce sujet, un représentant du CITC (La commission pour la technologie de l'information) a déclaré qu'il était interdit aux particuliers de commercialiser les appels internationaux par téléphone ou par Internet depuis leur appartement, sous peine d'une amende variant entre 1000 et 2000 SR Pour les établissements commerciaux non licenciés qui sont impliqués dans de telles pratiques, l'amende varie entre 10 000 et 20 000 SR.

 

Réalisation de plus de 1000 km de réseau routier à Al Baha - Al Watan 20.2.05

La région d'A| Baha a bénéficié de a réalisation de projets vitaux dans le domaine du transport, avec la réalisation et la mise en service de 1 104 Km de nouvelles voies ou de routes rénovées. Le Ministère des Transports est en charge actuellement de la construction, de la rénovation et de l'entretien de 576 Km de routes nécessitant un investissement de 100 600 000 riyals.

Le directeur général des routes et des transports de la région d'Al Baha a annoncé au quotidien Al Watan qu'un projet couvrant la réalisation de plusieurs tronçons de routes sur une distance totale de 425 km avait obtenu l'agrément permettant le début des études. L'architecte Abdul Aziz ben Mohamed Al Badawi souligne que d'autres projets importants sont sur le point d`aboutir, comme la route à deux sens de l'aéroport sur 44 km pour un montant dépassant les 200 M de riyals. Une enveloppe de 100 M de riyals est d'ores et déjà prévue pour la réalisation de 350 km supplémentaires sur les routes de la Haute et de Basse Shadda, de Okha Thy Mena et de Keloua Bel Assoued. D'autres travaux seront réalisés sur les axes Akba al Malik Khaled AI Amir Abd Allah, d'Al Souidy à Al Ramitha, de Ouadi Mina, de Djaoua, de Djercl Beni Kebir et de Beni Ali à Tihama.

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Des travaux d'amélioration devraient aussi être effectués dans les tunnels de la région. Malgré les conditions climatiques extrêmes, le sable et les grands espaces vides à traverser, le réseau routier saoudien est remarquablement entretenu et participe au plaisir de découvrir les merveilles du pays.

 

Expansion des télécom à AI Baha - Al Watan 20.2.05

Le nombre des portables a atteint 88 344 lignes, ce qui a entraîné la création de 14 bureaux de services des abonnés. Dans le but d'améliorer les services liés au réseau des téléphones mobiles dans la région, 75 derricks ont été mis en place pour renforcer la couverture du réseau. D'autre part 50 000 lignes de téléphones fixes et 300 cabines publiques ont été installées.

 

6,8 millions de mètres carrés des rues de Diedda goudronnés - AI Watan 20.2.05.

Le province de DJedda a terminé la mise au point de son plan de voirie prévoyant le goudronnage des rues principales dans la ville. Près de 6 800 000 m2 ont été goudronnés au cours des 6 derniers mois dont un total de 640 052 m2 exécutés dans la nouvelle Djedda.

Des travaux de même nature ont été réalisés dans les quartiers de Briman de Sharafeyah, d'Azizia, de l'aéroport. du centre ville, de Dhahban. de Khozam et de l'Université. Le coût total de ces opérations avoisine les 50 millions de Riyals.

 

Goudronnage de 1 245 km à Gizan - Al Watan 6.3.05

C'est le plus grand des projets routiers qui va voir le jour dans la région de Gizan, à l'occasion de la création d'un réseau de voies à deux sens goudronnées sur 1 245 km. Une autoroute du bord de mer reliera notamment Shogayg et Al Towal sur 230 km pour desservir le Royaume et le Yémen. Coût de ce projet visant au développement du tourisme dans la région : 514 000 000 de riyals. Les liaisons Sabia - Abou Arich ainsi que - Ahed Al Masarha sont également concernées. Cette autoroute sera utile à l'exploitation des ressources piscicoles développées à Gizan. 30 projets ont été agréés, et 33 autres sont à I'étude. Cette amélioration portée au réseau existant devrait faciliter la fluidité du trafic routier entre les villes et les localités secondaires du littoral et des montagnes.

 

Revitalisation du tourisme au Yémen - Saudi Gazette 21.3.05

Les effets désastreux du 11/9 sur le tourisme au Yemen commencent à s'évanouir. Des dizaines de touristes occidentaux parcourent les rues de Sanaa apportant avec eux des précieux euros et dollars à ce pays decrit par Christian Chaise de l'Agence France Presse comme étant l'un des plus pauvres du monde. "ll y a plusieurs touristes âgés. mais ils n'ont plus peur pour leur sécurité actuellement," déclare Giorgio Brambilla d'ltaIie.

"Le tourisme s'est particulièrement affaissé au Yémen car c'est le pays originaire de la famille d`Osama Bin Laden." déclare Marco Llvadiotti qui est à la tête de la plus grande agence de voyage dans le pays.

'Les occidentaux s'attendaient à des événements très dramatiques au Yémen. A la fin ils ont en eu marre d'attendre alors que les innombrables sites magnifiques du pays continuaient de les tenter. Comme rien de méchant ne s'est passé il y sont retournés" a-t-il ajouté. "Pas un n'a été kidnappé' depuis 2001, confirme Arik Khan directeur d'un d'hôtel à 5 étoiles" et il ajoute le Yémen attire une catégorie bien particulière de touristes. Ce n'est pas comme Dubaï où les gens sont attirés par les grands centres pour leur shopping et les boîtes de nuits. Cependant, insiste-t-il, un vrai resplendissement du tourisme au Yémen dépend de la relaxation des procédures qui imposent aux touristes d'obtenir des permis officiels pour le visite de chaque région du pays. Malgré tout, les Américains et les Britanniques sont difficilement repérables au Yémen, mais des touristes français, allemands, italiens et japonais arrivent en grand nombre pour admirer les merveilles de ce pays."

C'est un souci constant du gouvernement de rechercher des alternatives aux réserves de carburant en voie d'épuisement, "Cependant selon Livadiottí, le pays manque d'hôtels, dont deux seuls à 5 étoiles à Sanaa pourvus de moins de 500 chambres chacun. sans compter le manque d'équipements et de services adéquats au niveau des aéroports".

"Le plus alarmant, selon Livadiotti, c'est le grand risque auquel est exposée la richesse archéologique abondante du pays, en absence de lois et de moyens efficaces pour assurer sa protection."

 

Bonne nouvelle pour les femmes - AN 20.3.05

Bientôt les femmes en A.S pourront conduire leurs automobiles" prévoit Dr Abdullah Omar Nassil, ancien vice-président du Conseil de la Shoura et ancien Secrétaire Général de la Ligue du Monde Musulman. Cette pratique n'est pas contraire à l'Islam, et pourra prendre effet graduellement à partir des grandes villes : Diedda, Riyad, Dammam," a-t-il ajouté.

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Du cinéma, mais... - Saudi Gazette 22.3.05

Une firme saoudienne a obtenu récemment la permission de l'Emirat de la Province de l'est de construire 6 salles de cinéma. Cependant le projet s'est vu stopper lorsque les autorités ont averti les gérants de la firme en question qu'ils seraient les seuls responsables à faire face aux éventuelles (!) remarques ou protestations des autorités de la Commission de la Promotion de la Vertu et la Prévention des Vices. ll s“agit selon Saudi Gazette d'une nouvelle à la fois bonne et mauvaise. Pour un porte-parole de la société concernée, "c`est parce que nous avons déja vécu de mauvaises expériences et que nous n'avons aucun service apte a traiter avec ladite commission que nous avons décidé d'annuler cette partie du projet: Cependant le bâtiment a été construit de façon à permettre l'aménagement de salles de cinéma en cas de changement de la position des autorités vis-à-vis du projet initialement proposé. Si tel était le cas nous serions les premiers à ouvrir un cinéma".

 

Exploration du Rub'aI Khali

L`Administration Saoudienne de l'Arpentage va entreprendre une nouvelle exploration scientifique duRub'al Khali (<< Le quart vide ›>). Les objectifs de l'ex- pédition sont la découverte de secrets géologiques, écologiques et biologiques. La recherche de ressources économiques est également une part importante du projet. Cette immense zone désertique est restée jusqu'à aujourd'hui pratiquement inexplorée par les scientifiques. Aucune étude n'a été, jusqu'à ce jour, suffisamment détaillée pour contribuer efficacement au développement de cette région et à la préservation de son identité écologique.

 

Des milliards de Riyals endormis... - Al Watan 13.2.05

Le quotidien Al Watan a critiqué, dans son numéro du 13 février, l'existence d'une manne de plus de 422 milliards de riyals dans les banques saoudiennes, dont une moitié serait stockée en dépôt « à vie ››, n'étant consacrée ni à un fond d'investissement, ni à une épargne quelconque, et privant le marché d'une forte liquidité. Le même quotidien remarque un accroissement des prêts personnels et des prêts à court terme, qui représentent plus de 58% du total des prêts contractés. Ceci démontre que les pratiques traditionnelles continuent de prévaloir sur les opérations officielles, laissant penser que certaines banques n'hésitent pas devant l'opportunité de réaliser rapidement de gros profits sans aucun contrôle sur les prêts accordés.

 

Adieu J.L.O., 26 glorieuses années...

Une vingtaine de personnes essentiellement anglophones ont célébré mercredi 17 mars le 26ème anniversaire du Jeddah Light Opéra, le seul groupe théâtral de Djedda dédié à la présentation d'opérettes depuis 1977.

La soirée s'est tenue sous la forme d'un dîner somptueux autour de la piscine du compound Flamingo, résidence de la Présidente de l'association, Jane Peregrine Mc Eneany. Jane dirige l'activité du groupe depuis l'année 2000, ayant succédé au talentueux musicien John Alford.

Depuis 1977, J.L.O. a mis en scène 87 pièces accompagnées de musique, de chant et de danse. Grâce au talent de 23 metteurs en scène, de 22 producteurs et de 23 chefs d`orchestre, les nom breux exécutants ont toujours su combler les amateurs de culture, d'art et de gaîté. Musiciens, choristes, maquilleurs, peintres, bricoleurs en tous genres... Sans compter les collaborateurs "administratifs" que sont les responsables de l'ordre, de Jane Peregrine la billetterie, de la publicité, bref tout un petit monde qui gravitait sur, sous, et autour de la scène et assurait la réussite des spectacles proposés.

La décision de dissolution du groupe a été prise par les trois membres du dernier comité de J.L.O. présidé par Madame MCEneany, en janvier 2005. Parmi les facteurs qui ont amené à prendre la triste décision, le manque d'adhérents et les bouleversements entraînés par les événements du 11/9.

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REPORTAGE

 

De DJedda à Méda'in-Saleh...

DJedda, mardi, 7h 20. Belle journée en perspective, Nous venons de prendre Madinah Road en direction du nord et je jette un coup d'oeil dans le rétroviseur : la voiture de Mike est juste derrière, cette fois nous sommes partis. Les enfants se sont endormis dès la sortie du compound, au moins la première partie du trajet ne devrait pas leur sembler trop longue. D`après nos estimations nous devrions couvrir les 850 Km qui nous séparent de Méda'in Saleh en une dizaine d'heures en nous permettant des pauses toutes les 1h 30 : le trajet fait partie de la ballade, pas question de traverser ces régions que nous ne connaissons pas à toute vitesse. Nous nous sommes mis d'accord pour nous arrêter quand nous le souhaitons pour nous dégourdir les jambes, voir un site intéressant sur la route ou faire quelques photos. De toutes façons le médecin a conseillé à Mike de ne pas conduire plus longtemps sans pause, cela tait une raison supplémentaire de se tenir à ce rythme.

Patrick (Piérard) nous attend là-bas. Je ne le connais que de (bonne) réputation et j'ai eu durant les derniers jours deux occasions de l'avoir au téléphone. Il a l'air très sympa et très accessible, et pour des " touristes " français il est certainement le guide rêvé. Si i'ai bien compris il vit en permanence à l'hôteI dans lequel nous avons réservé (Le "Méda'in Saleh hôtel "), donc on devrait pouvoir profiter de sa présence pendant les 2 journées complètes que nous passerons sur place. Nouveau coup d'œil dans le rétro : mince, il est loin. Problème de voiture 7 Il vient de la faire réviser. J`ai même remarqué ce matin qu'il avait fait changer ses 4 pneus. Pas de problème, on va ralentir. seulement, à cette vitesse, on risque de mettre deux heures de plus... Cela ferait arriver vers 19h00... Ce n'est pas catastrophique.

Je repense à ce guide dans lequel j'ai lu qu'il pouvait y avoir de la neige à cette époque de I'année sur les hauteurs dans la région d' Al 'UIa, à tel point que I'auteur déconseille d'y aller si tôt dans la saison. J'espère que cela ne sera pas si terrible, on a pris des affaires chaudes mais pas de moon-boots, et je n'ai pas de chaînes pour le 4x4 ! Ce serait quand même une sacrée surprise de voir tomber des flocons en Arabie ! J'aimerais bien voir ça, et je pense que je ne suis pas le seul. Quand je pense à la joie des enfants lorsqu'il pleut, j'imagine ce que cela pourrait être s'il se mettait à neiger !

9h10. 180 Km au compteur. Je vois une " station-service-garage-hôtel " désaffectée avec un grand hangar sous lequel on peut mettre les voitures à l'ombre : ça me paraît un endroit tout indiqué pour la première pause-café. On en profite pour discuter un peu. Mike voyage seul et s'occupe en réfléchissant à de nouvelles idées pour le futur magazine, alors |orsqu'on s'arrête il a plein de choses à partager.

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C'est reparti. On ne peut pas dire que le début du trajet soit passionnant : le paysage est relativement monotone et la route l'est complètement. Les check-points sont pratiquement les seules occasions de déconnecter le régulateur de vitesse, et la 2x3 voies dure jusqu'à Médine !

10h10. On s'agite dans la voiture. on a besoin d'une pause pipi (Ie café mettrait donc une heure à transiter de l'estomac à la vessie ?). OK. on s'arrête à la prochaine station et on en profitera pour compléter les pleins. C'est un truc qu'on m'a donné lorsque j'ai commencé à visiter |'Arabie : chaque fois que tu atteins la moitié du réservoir. tu t'arrêtes pour faire un plein. Cela permet notamment de palier aux mauvaises surprises du genre 300 Km sans une station !

11h25. Presque 300 Km au compteur. On a bien fait de s'arrêter tout à l'heure : la station était " nickel '. Les filles ont eu la surprise d'apprécier la propreté des toilettes qui feraient rougir de honte plus d'une aire d'autoroute de chez nous ! " Prends la position GPS " m'ont-elles suggéré " pour I'indiquer dans le magazine : celles-là, faut vraiment pas passer à coté sans s'arrêter... " Nous n'avons vraiment pas la même façon de faire du tourisme ! Moi je suis plutôt du genre à m'arrèter pour taire des photos des pancartes ' Attention, dromadaires !“ ou pour ramasser quelques exemplaires de l'espèce de courge qui pousse particulièrement bien sur la bande qui sépare les deux voies de l`autoroute (il s'agît bien de plantes, pas d'autostoppeuses)...

13h15. Oui, le seul point de la route qui m'inquiétait est derrière nous : la traversée de Médine. En fait c'est très simple et bien indiqué. Et puis lorsque tu es sur le périf tu ne peux pas tourner à droite (muslims only !) donc cela diminue par deux les risques de se perdre l Pourtant, on a quand même réussi la perdre Mike pendant quelques minutes : il a suivi une autre voiture pendant un moment avant de s'apercevoir que ce n'était pas la nôtre, distrait qu'il était par un appel sur son portable. C'est le même portable qui nous a permis de redresser rapidement la situation, alors je lui pardonne. Maintenant que nous sommes sur le tronçon Médine-Tabouk, on va profiter de |'ombre de cet acacia sur le bas-côté de la roule pour déjeuner. Mike confirme qu'il n'aime pas conduire seul sur de longues distances, pour cette fois-ci c'est trop tard mais prenons-en note.

15h00. Stop !! Je viens de voir sur la droite de la route des carcasses qui ressemblent à des 2C\/ fourgonnettes ! Demi-tour, vérification : pas de doute, c'est un cimetière de 2CV. Ici, au milieu du désert, cela me paraît magique, comme un air bien de chez nous, des souvenirs d'enfance, un goût de madeleine (de Proust). Pas question de repartir sans visiter ce lieu sacré !

16h15. Vraiment les routes ici sont en très bon état. Je me souviens m'être déjà fait la réflexion lorsque nous sommes allés jusque dans le désert, à l'est de Taïf, à la recherche de fossiles... Ces longues routes droites, au milieu des cailloux et du sable, à la merci du vent et du soleil, sont visiblement entretenues d'une manière irréprochable. Même la signalisation au sol semble neuve, et pourtant nous sommes au milieu de nulle part. Remarque nous sommes pratiquement les seules voitures sur la route, c'est peut-être un élément d'explication !

16h50. Nous quittons la route de Tabouk pour la dernière ligne droite vers Al “Ula, là où la route longe le tracé de l'ancienne voie de chemin de fer. C'est l'heure du goûter pour les enfants et du dernier café de la journée pour les plus grands. Le paysage est très sympa, les collines à l'horizon prennent des teintes très photogéniques avec cette lumière de fin d`apres midi. La hauteur toute relative des sommets les plus hauts sur l'horizon élimine définitivement de ma pensée l'espoir de voir de la neige cette fois-ci, à moins de perdre 1°C de température par mètre d'ascension. ce qui va a l'encontre de mes souvenirs d'école !

18h50. Nous venons de passer le dernier check point à l'entrée d' Al 'Ula. Patrick appelle sur le portable pour savoir où nous en sommes ! Quelle attention, l'accueil promet d'être excellent. Je vois le nom de l'hôtel écrit en lettres géantes posées à même le sable, au pied de la falaise. J'ai hâte d'être à demain, je me délecte à l'avance de ce qui nous attend.

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PROLOGUE

L'autre histoire de Méda'in-Saleh

 

Image classique de Méda'in Saleh: les tombes nabatéennes ne représentent qu'une infime tranche de |'histoire de la région d'Ai 'U|a. Les traces de passages attestent d'une présence humaine s'étendant de I'époque préhistorique jusqu'à nos jours.
 

Quel expatrié installé à Jeddah n'a jamais entendu parler de Méda'in Saleh et de ses tombeaux nabatéens creusés dans la pierre ? Situé dans la vallée de Wadi al-Qura, à quelques kilomètres d'Al 'U|a, le lieu est connu pour être à l'Arabie Saoudite ce que Petra est à la Jordanie : la marque d'une civilisation disparue qui n'a légué que peu d'autres traces de son histoire.

Lorsqu'il arrive à Méda'in Saleh, le visiteur remarque rapidement d'autres indices attestant d'une présence humaine antérieure à celle des Nabatéens. Gravures rupestres, tumulus, lieux de culte, les richesses archéologiques des environs sont autant d'invitations a s'arrêter plusieurs jours dans la régions. Et à en croire les spécialistes, beaucoup de choses restent à découvrir.

Entre Médine et Tabouk, à environ 800 Km au nord de Ddeddah, Al 'Ula fui un important centre sur la voie commerciale reliant la Mésopotamie a l'Arabie du sud. La présence d'eau, comme en atteste encore aujourd'hui la palmeraie, a certainement favorise la fixation de populations dans et autour de la vallée. Sa position stratégique lui a valu d'accueillir, plusieurs milliers d'années après les hommes de la période chasse - pêche - tradition auxquels nous devons les autruches et les dromadaires gravés a flanc de falaise, l'une des plus anciennes colonies d'Arabie: le Royaume de Dedan. Entre le cinquième et le deuxième siècle avant JC, jusqu'à |'arrivée des Nabatéens, la colonie occupa les alentours d'Al 'Ula. Les traces de l'occupation dedanite, moins spectaculaires et plus discrètes que celles de leurs illustres successeurs, quoique non moins intéressantes, n'ont pas sorti de l'ombre l'histoire de leurs auteurs. Patrick Piérard tenait à leur rendre justice dans ce numéro.


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DOSSIER SPÉCIAL

Sacrés Dédanites !

ou "L'eclipse regrettable de la Culture dédanite par les somptueux tombeaux nabatéens d'Al Hijr"

Quel coup de pub ces tombes monumentales des Nabatéens dans la large vallée d'Al Hijr, curieusement renommée Méda'in-Saleh dans la littérature islamique ultérieure ! Heureusement, Abdul Rahman al Ansari a rétabli l'équilibre grâce à des faits historiques exposés dans "The Civilization of two Cities, Al Ula & Mada'in-Saleh", publié en 2001 chez Dar Al-Qawafil. Il faudrait être stupide ou aveugle pour dénigrer ou occulter les merveilles dédanites que le livre de l'ancien Directeur du Département des Antiquités qui nous a fait découvrir par des photos superbes et du texte clair.

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Dédan, l'antique

Le nom de Dédan est apparu pour la première fois en archéologie vers le 6ème siècle avant J-C dans l'Ancien Testament au Livre d'lsaïe et dans les Annales assyriennes ainsi que dans les graffiti en arabe ancien de la palmeraie d'Al Ula. En 1909 et 1910, malgré les menaces de mort émanant de quelques xénophobes de l'oasis, les archéologues français Jaussen et Savignac ont réussi a relever et traduire suffisamment d'inscriptions minéennes et dédanites pour établir que la Dédan antique est l'actuelle

Al Ula, la Haute ou l'Altière. En bref, cette oasis habitée par la tribu arabe des Bani Lihyan est considérée comme l'une des Cités-Etats de l'Antiquité arabe. Certes, les Minéens du Sud ont gouverné pendant 400 ans la palmeraie de leurs partenaires commerciaux dédanites. Mais, quand le Royaume de Main, sur le territoire du Yémen actuel, s`est effondré en 200 avant J-C sous les coups des Himyarites, les Minéens ont abandonné la place, laissant derrière eux dans le Diebel Khurayhah une citadelle aux remparts et aux escaliers de ronde impressionnants. Tout indique que la cohabitation entre Minéens colonisateurs et Dédanites administrés a été sereine puisque, dans leurs inscriptions, ils s`échangeaient même leurs dieux, Dhou-Ghaibat pour les Dédanites et Wadd (amour) et Nikrah pour les Minéens. Avec le bon sens qu`on leur connaît, il est remarqué que les Nabatéens au siecle avant l'ère chrétienne se sont installes a Al Hijr a 25km au nord d'Al Ula,....

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...manifestement pour éviter des frictions quotidiennes avec la population locale de l'oasis échaudée par les pillages des nomades à la saison de maturité des dattes. Même les caravanes commerciales et religieuses ont vite trouvé un itinéraire de contournement via Zéribah, à travers les collines de grès à 12 km à I'est de Wadi Qura, la vallée où se blottit Al Ula.

 

Les graffiti dédanites

Ils sont de deux types, gravés en creux ou piquetés autour de chaque lettre qui apparaît ainsi en superbe bas-relief. A.R. Al Ansari et Hussein Ali Abul Hassan ont signalé les trois plus beaux gisements de textes. Dans l'ordre d'importance, ce sont la falaise nord-est du Djebel Iqmah, le sommet du piton gréseux d`Umm Daraj, et la falaise ouest de Djebel Khuraybah. Ensuite, les randonneurs du Mada'ín-Saleh Hotel en découvrent chaque mois de nouveaux pour le plus grand bonheur des épigraphistes européens, Leïla Nehmé du Laboratoire des Etudes Sémitiques Anciennes (LESA/ CNRS) et M.C.A. McDonald, son correspondant britannique, le spécialiste le plus pointu en écriture dédanite. Quand les touristes béotiens, dont je suis l'humb|e serviteur, sont honorés d'une traduction, ils découvrent des divinités, Dhou-Ghaibat, Salman, Abu Eelaf et surtout le Botin mondain de la bonne société dédanite, celle qui s'offre des sanctuaires dans la montagne, qui finance des statues en pagne de taille humaine telles que Jaussen & Savignac ont pu en photographier à côté cle la citerne de Mahlab al-Naqa. .J'observe que ces graffiti sont plus littéraires, plus descriptifs que les titres de propriété tatillons des tombes nabatéennes: dans le canyon entre les Djebels lqmah et Abou Aoud, un citoyen dédanite a avoué par écrit qu'il était accompagne par sa danseuse esclave préférée, O surprise, quand j'ai fait connaître à un ami de l'lnstitut des Etudes Moyen-orientalee du Caire ma soif de toute documentation traitant des indigènes d'Ai Ula, j'ai reçu dans le mois un extrait de l'Encyclopédie de l'lslam: au mot clé "Lihyan", il est fait mention de ce sanctuaire de Bir Udhayb qui comporte une quinzaine de graffiti dédanites noyés au milieu d'une centaine de noms en arabe koufi des pèlerins du Hadj. Manifestement, ces derniers ont souvent campé là au frais et à distance des sédentaires de l'oasis traditionnellement soupçonneux a regard des routards de toutes les époques. Le Musée archéologique d'Al Ula ignore soigneusement cette Histoire dedanite qui semble frappée par un tabou religieux. Pourtant, les vestiges et graffiti dedanites abondent tout autour de la palmeraie, Les guides du Madaïn-Saleh Hotel ont dans leur repertoire une quarantaine de sites dedanites avec textes généralement attribués à des guetteurs qui s'ennuient sur leur piton entre leurs tours de service. Exemple, au Diebel Zura: "lci, X, a fait le guet' ou encore, 3 km au sud du Qasr AI Sani nabateen, au lieu-dit Maka'ad al Djoundi, une longue ligne de dedanite est surmontée d'une ligne en nabatéen. Cet endroit paraît être la frontière entre Dedan et AI Hijr, la Nabatéenne. Pour savoir le fin mot de la pensée des collecteurs de taxe d'il y a 2000 ans, nous devons attendre la progression méthodique vers le sud de la Mission Archéologique Française. Ils viennent de terminer en décembre 2004 l'inventaire du site nabateen d'Al Hijr. Une autre source de connaissance du peuple dedanite est la cinquantaine de pierres remployées après avoir été pillées dans les temples des Djebels Khuraybah et Umm Daraj. Grâce encore aux relevés de Jaussen, il est possible d'en retrouver une dizaine, graffiti ou serpents protecteurs du domicile, dans les maisons croulantes du vieil Al Ula.

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Art rupestre d'avant l'écriture

[ NdE : sur l'original aussi, la photo ne correspond pas au texte ! ]

Si on accepte 2 600 ans comme ancienneté des premières écritures sud-arabiques du groupe Musnad, y compris le dédanite, il est admis que tous dessins des environs d'Al Ula qui excluent strictement l'écriture sont datables dans le créneau de 2 600 à 15 000 ans. Pourquoi s'en étonner quand en Espagne et en France des peintures rupestres en grottes sont estimées vieilles de 20 a 30 000 ans? Les dessins de bouquetins et d'hommes style bâton les plus patinés sont ceux du pied est du Djebel Ai Ruzeqiyah à la sortie sud-ouest d'Al Ula. Le plus bel ensemble découvert en décembre 2004 par une Anglaise de Yanbu se situe sur le chemin du retour après la visite du canyon de Bir Udayb: elle a eu un cri du cœur "Oh, le beau pot de fleurs !" A 30 m de haut, sur un pan de falaise, elle avait flashé sur les plus hauts d'une centaine de dessins, des amphores. Ensuite, aux jumelles ou en escaladant sont apparues des vaches sacrées encore reliées a leur veau nouveau né, des autruches soit carrées, soit rondelettes et palpitantes de vie, des hommes en silhouette piquetée, de curieux damiers, des pieds et des mains d'orants (?).

Tres anciens aussi sont les bouquetins ibex gravés sur le rocher d'Umm Nasser que nous montrons aux visiteurs d'Ad Dir, le vieil Al Ula. lls sont la preuve que ce rocher de grès rose a été de longue date une tour de guet naturelle et un site d'habitat primitif pour les chasseurs-cueilleurs du Neolitique. Le croquis d'AI Ula dessiné il y a 95 ans par Jaussen montre d'ailleurs une source aux abords nord d'Umm Nasser. C'etait a l'époque où les habitants pompaient 50 fois moins d'eau que maintenant et où 6 sources coulaient naturellement dans le thalweg d'Al Ula. Le chameau qui a été domestique il y a 3 000 ans est un autre thème qui apparaît a une époque manifestement plus tardive que les ibex. ll est souvent associe avec des hommes avec arc, flèches et épée comme sur le rocher éboulé au pied sud-est du Djebel Al Ruzeqiyah et au nord de l'Arche de Pierre du kilomètre 9 de la route de Hail. La femme apparaît rarement: quand Bhakta le Népalais m'en a signalé une en bas de la piste muletière turque descendant du Belvédère du Harrat al Uwayrid, sa longue chevelure et la courbe de ses hanches lui a valu le nom de Miss Al Ula. Montrée à Abdallah Nassit, notre référence en histoire locale, il a déclaré qu'il n'étalt pas jaloux vu qu'il en connaissait une plus belle encore. J'attends encore qu'il nous la montre à son prochain retour périodique à son oasis natale. Peut-être protége-t-il jalousement sa nana de nos regards de Khawa/'al en manque? J'ai une nouvelle monnaie d'échange: en février 2005, une Française de Riyad a repéré au flanc est d'Umm Daraj une Mama, la première en style bâton: le torse a ce qu'il faut, la où il faut, de façon parfaitement géométrique. Elle est maintenant un must pour tous les visiteurs d'Al Ula: seuls les timides refusent ce rendez-vous qui est systématiquement contraire a leur programme.

Les tombes à la traîne de l'Âge de Bronze
 

 

Le paysage d'Al Ula, comme souvent à travers toute l'Arabie du Sinaï à l'Oman, est riche en structures funéraires placées sur les crêtes.

 

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Pour mieux attirer l'oeil, le tumulus est accompagné d'une traîne faite de cairns régulièrement espacés comme seule la main de l'homme peut en faire. La plus longue que nous connaissons fait 1 km de long, a Al Lahan, à l'ouest de la Nationale Khaybar-Médine, à 80 km au nord de Médine. Les cairns en bloc de lave se découpent sur une ligne d'horizon plate bien avant d'être au plus près de la structure funéraire. La plus belle traîne proche d'Al Ula est celle sur le plateau sud-est de la gare du Chemin de fer du Hedjaz No 19: les cairns de 2 m de haut sont intacts et forment un râteau, dents vers le ciel, auyeux des visiteurs qui se retournent après avoir admiré les ibex du pied nord-est du Djebel Al Ruzeqiyah. En randonnée, nous montons prioritairement voir de près les tumuli du Djebel Mahash au sud-est du Mada'in-Saleh Hotel. Même s'ils sont a moitié éventrés par les pilIeurs de trésor, ils ont le mérite de montrer un bel agencement de pierres sèches dans leur moitié non saccagée. Les autres tumuli qui font les délices des spécialistes sont les cinq groupes en bordure nord de la route de Hail au kilomètre 5 et ceux du Harrat al Uwayrid en blocs de lave brute, sur le côté nord dela nouvelle route, 8 km avant d'atteindre le Belvédère du Harrat le plus sophistiqué, Qafyat al Hayran, un tumulus (fouillé par le Dépt des Antiquités en 2000, rapport tabou non publié)...

Toute la périphérie d'Al Ula n'est qu'un vaste musée d'histoire à ciel ouvert, dans un décor somptueux



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...avec un mur circulaire de 30 m de diamètre et une traîne faite de 4 murs triangulaires le long d'un rayon extérieur vers l'ouest Ce dernier tombeau est au programme de la journée quand on nous commande le circuit Al Ula à Qala'at al Muazam à Tayma à Jahara à Al Ula en 4x4. Comme pour Jaussen en 1910, ce tumulus nous apparaît comme un "guidon" au sommet plat de la colline à 50 km au sud de Tayma et à l'est de la grand'route des pèlerins jordaniens du Hadj. A notre regret, Jaussen n'est pas monté expertiser ce "guidon": il a cru qu'il s'agissait d'une montagne plus haute et plus lointaine qui aurait disparu quand il est passé au pied de Qaryal al Hayran, la colline de l'hésitant, allusion au chamelon d'un jour qui tremble sur ses quatre pattes. Aucune de ces tombes ne porte d'inscription puisqu'elles sont deux fois plus anciennes que l'apparition de l'écriture. La datation se fait à partir des os et des offrandes aux dieux enfouies avec le défunt.

Revue perspective

Intentionnellement, Histoire de Dédan, graffiti dedanites, Art rupestre d'avant l'écriture et tombes de l'Age de Bronze ont été traités sous le “chapeau dédanite“. Nous croyons à la continuité de l'homme indigène d'Al Ula, du chasseur d'ibex court vêtu jusqu'à mes amis Baladi actuels. Il n'y a pas d'indices historiques de massacres ou de catastrophes naturelles qui auraient fait fuir la totalité de la population de souche dedanite ancestrale. Certes, la sécheresse qui a sévi pendant 20 ans durant le siècle avant le Prophète Mahomet (PBUH) a fait fuir les fermiers nabatéens d'Al Hijr vers le Croissant fertile de Syrie. Je ne crois pas que cela soit le cas des sédentaires de la palmeraie: quand je rencontre Abdallah Nassif et Séoud al Thyab, tous deux nés à Al Ula, j'ai le sentiment de dialoguer avec les purs descendants des chasseurs d'ibex et des chameliers de la Route de l'Encens. De plus, le mariage hors tribu n'est pas ici dans les mœurs. ll me reste toutefois des problématiques, des points d'interrogation :

L'analyse du Corpus des abondantes inscriptions dedanites semble encore rudimentaire. Ce travail de bénédictin devrait apporter plus d'informations que chez les discrets Nabatéens peu enclins aux vantardises militaires des Assyriens. Au Diebel Khuraybah, les tentes des étudiants séoudiens en archéologie viennent d'être montées en février, les brouettes de fouille sont arrivées. Une 2ème campagne de fouille va commencer alors que la 1ère en 2004 avait déjà découvert les murs d'un temple avec plusieurs représentations du dieu serpent dans la pierre + un tronc de statue semblable à ceux photographies par Jaussen + un socle de statue avec 3 lignes de texte. Il y a donc un immense espoir de voir l'Histoire de Dedan décoller sans à priori ni tabou. Wait and See. Inch Allah !

PS : L' illustration photo de ce texte est à l'obligeance des derniers visiteurs d`al Ula, Simon Bernard, Jacques APTEL, Gilles MAUBOUSSIN, Philippe BARREHE, Guy HERY.

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INTERVIEW

Interview: Un Jedaïte célèbre

Nous avons eu la chance de rencontrer un personnage incontournable de la communauté française d'Arabie qui est aussi l'auteur du dossier spécial de ce numéro. Bien qu'ayant quitté Djedda pour se retirer " à la campagne " à quelques 800 kilomètres dans le nord, il a marqué de son passage non seulement la ville mais tout le Hejaz qu'il a parcouru en long, en large et en travers. Encyclopédie vivante (et en français !) de I'histoire de l'Arabie ancienne, il a gardé intactes sa disponibilité, sa gentillesse et sa passion : les amateurs de off road en Arabie ont certainement reconnu Patrick Piérard.

A l'occasion de ma venue à Al Ula (voir pages 11, 12), lors d'une soirée dans le désert, près d'une tente préparée en l'honneur d'une cinquantaine de touristes qui venaient de passer la journée autour de Méda'in Saleh, j'ai profité de l'heure du thé pour dérober cette petite interview à Patrick.

Mike : Patrick raconte-nous un peu ton histoire en Arabie Saoudite.

Patrick : Effectivement j'ai commence en Arabie en octobre 1981 avec Thomson Electronique à Riyad, dans un travail qui m'a beaucoup plu mais qui ne m'a pas permis de faire du tourisme. J'ai travaillé comme assistant technique d'un programme qui nécessitait des déplacements chaque mois à Djedda, à Taïf, à Khamis Mushait dans le sud et à Tabuk dans le nord. Ça, ça a été mon premier contact avec l`Arabie au lendemain d'un séjour de deux ans en lrak.

M : C'étaI! en quelle année ?

P : Octobre 1951 jusqu'à octobre 83.

M : La plus grande partie de ton séjour en Arabie s'est faite à Diedda, n'est-ce pas ?

P : Oui effectivement. le passage à Riyad n'a duré que 2 ans. Je suis retourné 4 ans en France pour m'occuper de la documentation d'un contrat important et c'est après 4 ans de production et suivi de documentation que j'ai demandé de partir à l'étranger et qu'on m'a envoyé 10 ans à Djedda faire le suivi de l'utilísation, de la mise à jour et de la gestion de cette documentation.

M : Et d'où vient cette passion débordante pour les sites historiques d'Arabie ?

P : Eh bien j'ai mis le doigt dans l'engrenage du “guidage touristique" quand j'étais pendant 10 ans a Djedda Parce que ma famille était restée en France pour les études des enfants, j'avals des loisirs importants comme célibataire géographique, donc très vite i'al commencé par un club de randonnées au niveau de l'entreprise Thomson. Ensuite la Maison des Français m'a dit "Mais pourquoi pas pour nous aussi ?“. Et donc le club est monté d'un cran en nombre d'adhérents, et comme ]'étais membre de la Société d'Histoire Naturelle d'Arabie Saoudite et de la Maison des Français, les trois organisations m`ont utilisé comme guide pour les randonnées familiales. Tous les mois et avec 5 ou 6 camarades, on a assuré pendant 7 ans, jusqu'à mon départ de Djedda, le bon fonctionnement d'un club de randonnées basé à Djedda et rayonnant sur tout le quart ouest de l'Arabie.

M: Quand est-ce que tu as quitté Djedda, et quand y es tu revenu ?

P : J'ai quitté Djedda pour raisons médicales en octobre 98. Je suis revenu en Arabie deux ans après avoir réglé des problèmes médicaux. J'ai été contacté par le Sheikh Fahd bin Zaïd pour être rédacteur de programmes touristiques à Ríyad pour la Société Bin Zeid Travel, propriétaire de l'Hotel Medain Saleh a Al-Ula, et donc depuis octobre 2000 je travaille avec Bin Zaid. D'abord à Ríyad pendant deux ans, et a la suite de l`horrible attentat a New York” September 11 ", i'ai fini, à cause de la disparition des groupes de touristes étrangers, par être transféré sur Al-Ula où je prends plaisir à guider des groupes d'expatriés extrêmement variés aux alentours d'A|-Ula.

M : Comment la popularité de Djedda a-t-elle pu atteindre les Bin Zaïd ?

P : Ça a commencé de la façon suivante : l'Ambassade d'Arable Saoudite à Paris a eu connaissance de mes diaporamas sur le Helaz et le Dr Saud al Diab m'a contacté. "Puisque vous laites des projections pour tout le monde, soyez gentil d'en faire une pour I'écoIe coranique attachée à l'ambassade d`Arable Saoudite dans le XVIème arrondissement de Paris". .J'ai donc accepté de faire cette projection de diapositives pour les élèves de l'école saoudienne. Quand quelques temps plus tard la Saudia, qui souhaitait renforcer les liens avec les agents de voyage saoudiens et français, m'a demandé à son tour de venir présenter mon diaporama aux agents de voyage, cela a été l'occasion de me faire connaître par Sh. Fahd Bin Zaiïi. Six mois plus tard il me proposait un poste de rédacteur de programmes touristiques dans ses bureaux de Riyad.

M : Dans combien de publications as-tu écrit sur l'Arabie ?

P : Depuis que je suis chez Bin Zaïd je n'écris plus, mais avant j'écrivais un mensuel d'informations pour Thomson. J'ai ensuite écris pour “Bonjour Jeddah“ et les mêmes articles ont été traduits en anglais pour "Jeddah News". Puis, au bout de deux ans à la D. A., mon chef saoudien m'a entendu parler de mes randonnées et m'a demandé de bien vouloir les raconter. C'était le début de mes 17 articles pour la revue trimestrielle de cet établissement.

M : As-tu d'autres textes en français, autres que ceux que tu destinais à "Bonjour Jeddah" ?

P : Non. Le guide "Off-road in the Hejaz“ a été préparé avec l'aide de mes amis Patrick Legros et Dominique Janjou, et l'aide d'un ménage anglais qui a corrigé mon anglais. Finalement...

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...il a été publié par Motivate Publishing à Dubaï, et cette maison détient les droits sur les traductions en français mais elle ne les a jamais utilisés.

M : Rien d'autre, même caché quelque part ?

P: Non, mais le tiens à jour tous mes descriptifs parus dans routes les différentes revues que j'ai regroupés sous le titre de “Pérégrinations d'un naïf en Arabie'. Ce travail est encore en suspens mais pourrait être relance, pourvu que je sois libre de mon temps et que je bénéficie de la collaboration de personnes encore indéterminées.

M : Quelle est finalement le site qui te fascine le plus ?

P : J'ai eu des dadas successifs. A une certaine période, à Diedda, mes amis me connaissaient pour mes histoires de torts turcs, au point que la femme d'un banquier de Djedda a dit une rois à une maîtresse de maison : "S'il vous plaît rie me mettez pas à coté de Patrick, il va encore me casser les oreilles avec ses histoires de forts turcs'. J'ai élargi un peu mes champs d'intérêt, je suis passé à le voie du chemin de fer du Hejaz. et de là à la Route de l'Encens. Et maintenant je suis passionne par I'histoire des Dedanites, que j'estime trop méconnue comparée à celle des Nabatéens qui attirent toute l'attention sur eux avec leurs tombeaux somptueux, mais une absence totale de littérature, même sur les rochers. Je le regrette beaucoup car les Romains elles Grecs ont écrit sur les Nabatéens, mais les Nabatéens ont très peu écrit sur eux-mêmes en dehors de leurs titres de propriété sur les tombes. qui sont à thème unique et redondants,

M : Dans tour ça je suis curieux de savoir ce qui t'intéresse le plus : est-ce la beauté des sites l'histoire, les langues, la littérature de ces peuples ? Quoi précisément ?

P : C'est manifestement I'histoire, et je guette en particulier le moment où un spécialiste du Dedanite fera la somme des traductions des multiples graffiti de la région d'Al-Ula. Le Dedanite a influencé jusqu'à Taïma et il y a un spécialiste de premiere classe, le professeur McDounald qui fait évoluer l'étude de cette langue en la comparant aux langues sud-arabiques, le sabaéen, et le minéen, et en la comparant aux autres écritures, nord-arabiques comme le taïmanite, le doumanite, l'araméen et le nabatéen.

M : Y-a-t-il un organisme spécialisé dans I 'étude de I'Arabie antique ?

P : A Paris au CNRS, le Laboratoire des études sémitiques anciennes avec Laïla Némé a une cellule extrêmement dynamique qui actuellement est accaparée par |'étucle du site nabatéen d'Al-Hijr et après 3 années successives de séjours sur le site, Laila Némé et ses collaborateurs ont une vue très synthétique de ce que les nabatéens ont fait a Al-Hijr par comparaison a Petra. Je me desole du retard prie pour la connaissance des Dédanites, les indigènes d'AI-Ula, descendants des hommes de la période de chasse, de ces hommes qui gravaient des autruches dans la région d'Al Ula et toutes ces gravures sans textes que j'aime à montrer aux visiteurs (voir Pages 19. 20), Je manque de la somme d'informations historiques apportées par tous ces textes dédanites en raison des restrictions présentes imposées sur ce genre d'études.

Mïke Chama (à gauche) et Patrick P.

M : Parlons un peu de to i: as-tu dans tes projets I'idée de retourner à Djedda dans un avenir proche ?

P: Djedda est un souvenir heureux de mon existence. J'y ai passé 10 ans, et je considère que ces dix années ont été une période privilégiée grâce au soutien que m'a accordé mon ex-employeur (la compagnie T.T.). Pendant toutes ces années je n'ai eu aucun souci de salaire, de logement. de véhicule. Tout était réglé et assuré, ce qui n'est pas toujours le cas aujourd'hui. Je n'eri tais pas un drame, mais je me rappelle que chez T,T., à un moment où je devais assurer les études des enfants et l'amélioration de mon logement, j'ai eu une situation très confortable. Ce sont dix années de bons moments dont ma famille a également profite, grâce aux voyages offerts par la compagnie.

M : J 'ai appris que tu avais déjà été propriétaire d'une Peugeot. Es-tu, comme moi, un fana de la marque ? Dis moi sincèrement ce que tu penses de cette marque.

P : Avec plaisir ! Je n'ai jamais caché que j'étais un "peugeoïste fanatique". J'ai travaillé pour Panhard, qui était a l'époque une filiale du groupe Peugeot (PSA). Étant employé du groupe Peugeot, j'ai toujours mis un point d'honneur à rouler en Peugeot ! J'ai un peu regretté que le tout terrain Peugeot n`ait pas été commercialisé en Arabie, mais cela ne m'a pas empêché d'avoir trois Peugeot durant mes dix années à Djedda. J'ai d'abord été propriétaire d'une berline 405, mais j'ai acheté le premier break 405 dès qu`il a été disponible à Djedda ! J'ai du revendre ce véhicule après avoir été licencié par le groupe Peugeot, mais je suis resté fidèle aux voitures car des que; ai été embauché par « T.T. ›› |'ai acheté mon second break 405. C'est le véhicule avec lequel j'ai réalisé 80% de mes sorties. Pour aller au Djebel Abiad sur les champs de lave, j'ai du soit louer un 4x4, soit me joindre à des amis en tant que passager.

M : Pourquoi cet attachement à Peugeot ? Est-ce le prix, l'aspect esthétique, ou est-ce simplement parce que c est une voiture française ?

P : C'est la réputation de Peugeot en Afrique par exemple : Peugeot voiture de brousse par excellence. Les voitures Peugeot ont été le cheval de bataille de l'industrie automobile française en Afrique. Et pour ma part j'ai toujours été très satisfait de mes 405. Auparavant, à Abu Dhabi, j'avais déjà eu pour voiture de fonction une Peugeot (404 break) avec laquelle j'avais fait des voyages notamment à Oman avec mes amis de l'Ambassade de France.

M : Merci Patrick, de nous avoir offert cette occasion de te connaitre un peu plus. Merci aussi de nous permettre d'utiliser tes écrits en Arabie Saoudite. Nous te souhaitons encore beaucoup de plaisir et de nombreuses découvertes nouvelles.
 

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ART

Eminemment féminin

La sélection de tableaux que j'ai souhaité vous présenter sur cette page reflète l'oeuvre d'une jeune artiste syrienne, Lamis AI-Hamawi, que j'ai eu le plaisir de rencontrer le 18 mars dernier à la Galerie AI-Alamiya à DJedda.

On ne pouvait qu`être séduit par le jeu des couleurs d'une palette où le turquoise répond au carmin, où |'aigue-marine côtoie le fuchsia, et où l'élément féminin s'affiche avec bonheur. "La femme est pour moi au cœur de la beauté universelle" déclare la jeune artiste. Romantisme, finesse des traits et sensualisme féminin révèlent d`une toile à l'autre la sensibilité du peintre.

 

Les tableaux de Madame Al-Hamawi rappellent parfois les anciennes peintures arabo-musulmanes, voire persanes, "mais dans un cadre et un style contemporains" affirme l'artiste. Malgré un style non figuratif et l'absence de titre, la peinture reste suggestive. Dans une technique mêlant surréalisme et expressionnisme, tout invite le visiteur à savourer la vie a travers un prisme éminemment féminin, face à un monde fondamentalement masculin.

Née en 1976. Lamis Al-Hamawi a fait l'École des Beaux-Arts à Damas. Elle a participé à des expositions dans son pays, la Syrie, à Alexandrie, à Riyad et à DJedda.

M. C.