Ceci est le texte intégral d'un historique des faits de guerre concernant le GC 2/8 entre septembre 1939 et juin 1940 ( Page d'introduction ).

Les images ne font pas partie du document original, elles ont été rajoutées pour illustrer cette page internet.

Maurice Celse, mitrailleur en avion.

 


HISTORIQUE DU GROUPE DE CHASSE 2/8
 


À la déclaration de guerre, le 3 septembre 1939, le G.C. 2/8 est à Marignane, commandé par le Commandant GIBON Guilhem. Il se compose de la 3e escadrille et 4e escadrille de la 8e Escadre. La 3e escadrille (Le Requin) est aux ordres du Capitaine GRANDBESANÇON, la 4e escadrille (Le Chardon) aux ordres du Capitaine de VAUBLANC.
 


Le groupe équipé de Potez 63 est mis à la disposition de la marine. Il doit protéger les ports et grâce à ses bimoteurs est à même de faire la chasse en haute mer. Mais l'Italie ne décide pas à entrer en guerre et les pilotes brûlent d'impatience. Le 1er novembre, le Commandant de PONTON d'AMECOURT retour de Pologne rejoint le G.C. 2/8 dont il prend bientôt le commandement. Cette première période de la guerre sera une période d'entrainement intensive des équipages qui accomplissent de nombreuses reconnaissance et missions photographiques jusqu'en Sardaigne. Une section commandée par le Lieutenant POIRÉ est détachée pour la défense de la Corse.

Le 21 décembre, le groupe est dirigé sur Calais, terrain de Marck. Est-ce la vraie guerre cette fois ? Non, car l'ennemi est rare encore. Cependant un adversaire redoutable, le climat attendait dans le nord ce groupe méditerranén. La neige, le froid, le verglas seront nos pires ennemis. Le travail des mécaniciens est très pénible, mais chacun saura se montrer avec bonne humeur à la hauteur de sa tâche. Cependant les décollages sur alerte et les patrouilles à priori se multiplient hélas sans résultat, car les rapides avions de reconnaissance ennemis évitent soigneusement tout contact avec les notres. Dans le courant de janvier (1940), le G.C. 2/8 abandonne sans regret ses Potez 63 et est rapidement transformé sur Bloch 152.

[ Janvier 1940 Accident Levavasseur, St Gall ]



Le 10 mai 1940 à l'aube, la guerre commence, à 4 heure 30 les premiers Heinkel font leur apparition. Les patrouilles d'alerte sont là comme chaque matin depuis des mois prêtes au combat, mais une épaisse couche de brume au sol interdit les décollages. Les ennemeis de plus en plus nombreux tournent sur la région avoisinnante du terrain et parraissent chercher sa position exacte. La brume se dissipe légèrement et une patrouille simple reçoit l'ordre de décoller. Deux moteurs refusent de partir et le sergent-chef HONORAT est le seul à pouvoir prendre l'air. A ce moment précis le bombardement commence. Deux mécaniciens, le soldat GALLIAY et l'adjudant LAGEAT tentaient vainement de mettre en route un autre appareil, sont le premier tué, le second grièvement blessé. Le bombardement est de plus en plus violent, tout décollage est maintenant impossible dans ces nuages de fumée qui cachent les trous des bombes sur la piste. Heureusement les appareils ont été soigneusement dispersé, quatre avions seulement ont été détruits. Désespérés les pilotes voient s'en aller la proie tant attendue, mais ils seront consolés car le sergent-chef HONORAT se pose en ramenant au groupe sa première victoire. Il a abattu sur la plage un Heinkel III. Le mauvais temps nous a volé notre début de guerre mais nous nous rattraperons.


De 3 heures du matin à la nuit les pilotes ne quittent plus leurs avions. Les trous sur le terrain ont été relativement bouchés et pendant quelques jours il faudra décoller en slalom pour les éviter. Tout les jours suivant le G.C. 2/8 fourni au commandement les patrouilles pour les missions les plus diverses, protection de bateaux, couverture de points sensibles, protection de débarquement. Nous poussons des pointes en Belgique jusqu'à l'Escaut et nos avions ont peu d'essence et nombreux sont ceux qui rejoignent le terrain de justesse et se posent hélice en croix. Cet état d'alerte perpétuel est une rude épreuve pour nos nerfs, la moyenne de sommeil est de quatre heures par nuit mais il n'y a pas de volontaires pour chaque mission nouvelle.

14 Mai - Nous allons faire de la chasse d'armée en Belgique en ravitaillant sur un terrain avancé. Ce terrain tout petit et sabloneux est un véritable danger par lui même. Deux accidents au décollage les avions sont détruits mais les pilotes s'en sortent indemne miraculeusement. Nous devons tenir une longue permanence de couverture sur un point sensible de l'armée et nos moyens ne nous permettent pas de mettre plus d'une patrouille simple en l'air. Par suite d'accidents au décollage ou d'incidents mécaniques cette patrouille se verra réduite en patrouille légère. L'activité aérienne dans ce secteur est prodigieuse. Un de nos chef de patrouille, l'adjudant CURTHELET surpris par un messersmidt 110 sorti d'un nuage est abattu mais saute en parachute et rejoindra deux jours plus tard. La patrouille suivante composée du Lieutenant POIRÉ et du sous-Lieutenant DUTEY-HARISPE tient le secteur une heure 1/4 littéralement environnée d'ennemis mais joue à cache-cache avec eux dans les nuages. Ils sont remplacés par le Capitaine de VAUBLANC commandant une patrouille simple qui attaquée par 40 messersmidt 110 réussira cependant à leur échapper et rentre sans perte au terrain.

15 mai 1940 - Bonne journée pour le groupe. Rentrant d'une mission de protection, une patrouille de la 4e escadrille rejoint et attaque en mer deux bombardiers ennemis, deux victoires. Un Heinkel III à l'actif de l'adjudant MIR et du sergent-chef GAUBERT, un autre à l'actif de l'adjudant CLERC.

17 mai 1940 - C'est au tour cette fois de la 3e escadrille qui inscrit au tableau deux autres victoires toujours sur des Heinkel. L'un d'entre eux est abattu après une longue poursuite par le benjamin de l'escadrille, le sergent DIETRICH; l'autre verra le couronnement d'une belle attaque en tenaille exécutée par le sous-lieutenant JACQUEMENT et l'adjudant-chef MARCHAIS.

Dans la nuit du 19 au 20 mai, le groupe reçoit l'ordre de rejoindre Villacoublay où il est mis à la disposition du groupement de chasse d'armée 23. Hélas ! ce mouvement de repli a été trop tardif et notre échelon roulant qui est placé sous les ordres du Capitaine de MAISTRE et du sous-lieutenant Viaris sera obligé de faire demi-tour et de rejoindre Marck où quelques jours plus tard il sera capturé par les allemands. Heureusement le Capitaine de MAISTRE et le lieutenant mécanicien GUYOT réussisent à rejoindre Dunkerque d'où ils seront plus tard embarqués à destination de Cherbourg. Heureux sont ceux qui ne perdent que leur valise dans cette bagarre, mais le groupe amputé des 4/5 de son effectif et de tout son matériel roulant est terriblement gêné dans sa tâche.

21 mai 1940 - Toute la chasse française est sur les dents, la 7eme armée contre-attaque entre Cambrai et Arras. Le G.C. 2/8 fournit une patrouille triple de protection. Temps très crasseux, plafond 2.000 m. La D.C.A. allemande aux environs de Péronne est très active et précise. En fin de mission, la patrouille est attaquée par une forte formation de messersmidt 109. Le combat se termine par deux nouvelles victoires, un messersmidt abattu par le Capitaine de VAUBLANC, un autre par le sergent HUSSON mais nous avons perdu un de nos excellents pilotes, le sergent PETIT-JEAN, qui nous l'espérons a pu sauter en parachute. Plusieurs de mes appareils rentrent au terrain criblés de balles.

 

 

 

24 mai 1940 - Une patrouille double emmenée par le Commandant d'AMECOURT, part pour Marck où nous espérons avoir des nouvelles de notre échelon roulant. Désagréable surprise, notre ancien terrain est déjà aux mains de l'ennemi et le Commandant décide d'amener sa patrouille sur le terrain de Mardyck où à peine posée elle essuie un violent bombardement heureusement sans mal. Le sous-Lieutenant de la MENARDIERE qui s'est posé à Marck avec un Potez 63 ne reviendra pas.

27 mai 1940 - Le groupe enlevé à la marine a été réclamé par elle et nous retournons nous mettre à la disposition de l'Amiral sur le terrain de Deauville. Installation laborieuse. Un de nos pilotes polonais, le caporal-chef NOVAK qui a eu peu de temps pour prendre le Bloch en main se met en vrille dans un dégagement à basse altitude et se tue. Nous allons assurer la protection des embarquements à Dunkerque en partant du terrain anglais de Lympe. Nos pilotes échangeraient volontier le thé et les toasts, base de la nourriture anglaise contre un sandwich au saucisson et un coup de pinard.

1er juin 1940 - Trois missions au dessus de Dunkerque par mauvais temps, traversée de la mer à 200 mètres. Devant Dunkerque un convoi de bateaux est bombardé par l'ennemi, notre patrouille arrive à temps pour les protéger. Un Junker 88 est abattu par l'adjudant-chef MARCHAIS; un Heinkel III par l'adjudant NICOLE qui s'abat en flamme sur la plage. Décidément les victoires marchent par paire au groupe de chasse 2/8.

3 juin 1940 - Deux missions de protection de Potez de reconnaissance. Les anglais étant tous rembarqués, la protection de Dunkerque n'intéresse plus la R.A.F. tant pis les huit avions disponibles du groupe iront montrer leurs concardes aux français de Dunkerque. Les embarquements sont maintenant terminés et tout le groupe se retrouve à Deauville.

9 juin 1940 - Toutes les raffineries de la Basse-Seine sont en feu et d'immenses colonnes de fumée montent vers le ciel où s'etendant en nappes elles voilent complètement la lumière du jour. Deux patrouilles décollent dans cette nuit pour assurer la protection d'un de nos bateaux de guerre qui bombarde des rassemblements ennemis sur nos cotes. A quatre heure de l'après midi il fait toujours aussi noir et l'on nous confie le soin d'assurer la protection de cinq bombardiers en piquée de la Marine qui vont attaquer une colonne de chars allemands au nord-est de Rouen. Il y a neuf pilotes disponibles. Volant à basse altitude à cause du plafond de fumée, la formation est prise à parti par un tir intensif de D.C.A. dès sont arrivée aux environs de Rouen. Nous appercevons plusieurs patrouilles de bombardiers ennemis mais nous sommes dans l'impossibilité d'aller les attaquer car nous devons protéger les notres. Bien nous en prends de resister à cette tentation car une quantité de messersmidt attaquent nos patrouilles. La mélée est générale. L'un des notres, l'adjudant NICOLE, attaque un messersmidt 109 en bonne position et l'abat en flamme mais est lui-même obligé d'atterir en campagne, son avion percé de toutes parts ne répondant plus aux commandes. Ayant réussi malgré une blessure au pied à traverser la Seine à la nage, nous le verrons avec joie rejoindre le groupe. Au cours de ce même combat, le Capitaine GRANDBESANCON et le sergent-chef HONORAT, abattent un autre messersmidt 109.

 



Les troupes allemandes se rapprochent dangeureusement de notre terrain, allons-nous une fois de plus abandonner entre leurs mains ce que nous avons pu reconstituer de notre matériel ? Non, car le 11 jui n, nous nous replions à temps, cette fois, sur Estrée-la-Campagne, près de Caen. Ce terrain est un modèle du genre. Nos avions et nos voitures sont admirablement camouflés dans des bois de pins et rien ne nous désigne aux vues de l'ennemi. Chaque jour nous faisons des missions de reconnaissance afin de nous renseigner nous mêmes sur l'avance allemande.

15 juin 1940 - C'était trop beau ! nous recevons l'ordre de rejoindre le terrain de Cherbourg. Beau terrain du temps de paix, bien visible et de nombreuses fois reconnus sur lequel se trouve déjà des éléments de deux escadrilles de la Marine.

16 juin 1940 - Nous sommes en alerte pour la défense de Cherbourg, mais nous ne recevons plus aucun renseignement des postes de guet et devons décoller à vue si les bombardiers ennemis viennent dans notre secteur. La pluie et le brouillard nous dispensent de cette tâche ingrate.

17 juin 1940 - À la tombée de la nuit, une de nos patrouilles est chargée de la protection de Chance-Veught allant bombarder une colonne ennemie qui remonte le Cotentin à une vitesse incroyable. Au retour, l'adjudant VEYRUNES rencontre et attaque un Heinkel III qu'il abat et rentre se poser à la nuit tombée. La nuit entière se passe sur le terrain car l'on redoute une attaque des chars. Le lendemain matin éternels errants nous décollons pour Rennes. Là encore nous sommes environnés par les premiers éléments avancés de l'armée allemande. Nous rejoindrons successivement Nantes, Rochefort, Bordeaux, Toulouse et enfin Marignane.

22 juin 1940 - Le G.C. 2/8 dessert sur le terrain d'Aix-les-Milles, paré pour continuer la lutte.

23 juin 1940 - L'armistice est signée avec l'Allemagne. C'est fini.


 

 

 

 


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( Mis à jour le 15 juillet 2012 )